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Editorial n°263 – Décembre 2014

LOI « MACRON » : CROISSANCE OU OBSTINATION AVEUGLE ?

Emmanuel MACRON, Ministre de l’Economie, a dévoilé, le 15 octobre, les grandes lignes de son projet de loi « pour l’activité et l’égalité des chances économiques ». Ce texte devait être présenté en Conseil des Ministres à la mi-décembre et examiné au Parlement début 2015.

Ce texte entend s’attaquer aux «trois maladies françaises : défiance, complexité et corporatisme» qui empêchent, selon lui, de «libérer, investir et travailler». Cet assemblage hétéroclite de sujets a pour ambition de «lever tous les blocages» qui entravent la croissance.

L’orientation ultra-libérale est donc clairement assumée : redonner du pouvoir d’achat aux Français ne peut se faire qu’en baissant les prix, en
assouplissant les règles, ne parlons plus d’augmentations de salaires !

Parmi ces thèmes, on notera que la réforme des professions réglementées relevant du secteur sanitaire sera reprise dans la loi « Santé » que
Marisol TOURAINE prépare actuellement. A priori et sauf surprise (?), le monopole pharmaceutique semblerait ne pas être remis en question et
l’ouverture du capital des pharmacies d’officine être réservée aux « professionnels ». Nous restons attentifs et vigilants sur ces points.

Diverses professions réglementées (hors santé) sont concernées : notaires, avocats, huissiers, etc… tandis que le transport par cars va être ouvert à la concurrence.

Par ailleurs, cette loi « MACRON » introduit des modifications sur des sujets qui semblent bien peu en rapport avec l’économie au sens propre : la justice prud’homale et le travail du dimanche !

D’une part, la réforme des conseils des prud’hommes vise à raccourcir les délais et à réduire le nombre important d’affaires portées devant les juridictions d’appel. La conciliation sera encouragée (l’on peut être dubitatif sur ce point !), notamment en imposant la rencontre avec un médiateur ou un conseiller prud’homal. Les justiciables pourront s’adresser directement à une «formation de jugement» présidée par un magistrat professionnel.

C’est le principe même de la justice prud’homale qui est ainsi profondément remis en cause, sans concertation avec les partenaires sociaux !

D’autre part, la loi veut élargir les dérogations à la règle du repos dominical pour permettre à un plus grand nombre de commerces d’ouvrir le
dimanche, en particulier lorsqu’ils sont situés dans des «zones touristiques à fort potentiel économique». Les salariés concernés devront être volontaires (l’on connait la valeur du volontariat sur le terrain !) et recevoir une «compensation importante» (?). La loi évoque un salaire doublé dans les établissements de plus de onze personnes (une fois encore, les salariés des TPE sont laissés pour compte !). Le nombre d’autorisations d’ouverture délivrés par les maires passerait de 5 à 12 par an.

Le «travail en soirée» pourra également être autorisé, «sur décision de l’Etat» (?), dans les «zones à haut potentiel économique» avec des
majorations de salaire (?).

Sur ces deux derniers points, que fait le Ministre du Travail ? Ceci confirme la volonté gouvernementale de rendre le Code du Travail soluble dans l’ultra-libéralisme économique…

Selon deux membres des « Economistes atterrés », « Emmanuel MACRON n’a jamais été élu, n’a jamais dirigé la moindre entreprise, n’a aucune expérience de l’industrie et n’a jamais fait d’étude d’économie ».

Sa nomination comme Ministre de l’Economie prouve le talent de nos « élites » à persévérer dans la même direction qui nous mène droit dans le mur de l’austérité. A quoi sert une politique de l’offre si la demande ne suit pas ?

Ne doutons pas que s’il reste aux responsabilités, ce « surdoué » ne manquera pas de démontrer encore son inventivité en s’attaquant à la baisse des salaires, à la suppression du SMIC et du Code du Travail, ces « contraintes qui pèsent sur la croissance »…

 Avec pour ambition ultime de débarrasser les entreprises du poids du salariat !

Olivier CLARHAUT