Journal

Editorial n°264 – Mars 2015

Pensée unique : nouvelle arme de destruction massive

Il est de bon ton, dans les débats de haute tenue, entre gens biens nés, de convenir que la société doit être réformée :

  • L’esprit d’entreprise doit être facilité et libéré de toute entrave,
  • Le coût du travail doit être allégé pour cause de compétitivité,
  • L’Etat n’a plus les moyens de financer un modèle social français qui date de 70 ans,
  • La dette et les déficits publics sont gigantesques et impliquent obligatoirement une politique d’austérité, sans aucune alternative possible,
  • Il faut travailler davantage, y compris le dimanche, et plus longtemps, etc…

La litanie des économistes ultra-libéraux est encore bien longue et nous nous en tiendrons là pour résumer ce matraquage politico-médiatique qui fait office de conditionnement des masses.

Parallèlement, parmi ceux qui tentent avec difficulté de proposer une autre
approche raisonnée et argumentée, les syndicalistes passent pour des idéologues rétrogrades !

Notre logiciel serait bloqué au milieu du 20ème siècle et nous serions frappés d’obsolescence, obstinément accrochés à nos acquis sociaux comme des moules à leur rocher…

La pensée unique serait donc la nôtre, celle des affreux ringards incapables de comprendre la mondialisation de l’économie, de s’y adapter, et hostiles à la nécessité de réformer la société ?

C’est la vérité universelle qui nous est assénée à longueur d’émissions télévisées où l’on invite toujours la même douzaine de « prédicateurs ».

Cette pensée dominante a une caractéristique constante et inamovible : la nécessité de réformer !

Pour le commun des mortels, le concept de réforme s’inscrit dans une démarche positive, pour améliorer le fonctionnement, l’efficacité ou la justice, par exemple.

Or, pour nos élites, les réformes consistent immanquablement à demander des sacrifices au peuple ! Ces sacrifices sont d’autant plus acceptables pour ceux qui les recommandent qu’ils ne s’appliquent pas à eux-mêmes… Par exemple, les députés sont favorables aux réformes des retraites sauf à celle de leur propre régime !

Par contre, lutter contre les fraudes aux prestations sociales (travail dissimulé) ou, plus grave encore, contre l’évasion fiscale (désormais organisée au stade industriel) n’intéresse personne alors que c’est la
principale cause de tous nos maux.

En effet, les déficits publics sont causés, directement ou non, par ces entreprises ou particuliers qui ne respectent pas le premier devoir de tout citoyen : celui de payer ses impôts et de contribuer, de manière proportionnelle à ses revenus, au fonctionnement de l’état républicain.

L’austérité n’impose-t-elle pas aux pauvres et aux classes moyennes de se sacrifier pour que les plus riches puissent poursuivre leur fuite
financière ?

Ne laissons pas les salariés que nous défendons se laisser convaincre par ce
conditionnement intellectuel et se résigner.

Le syndicalisme doit aussi être facteur d’émancipation et d’esprit critique !

 Olivier CLARHAUT