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Editorial n°261 – Juin 2014

Les rentiers vont bien, merci pour eux !

Alors que la pensée unique se concentre depuis bien longtemps autour de la compétitivité des entreprises et du coût du travail en France, il semble judicieux de porter notre regard là où de (très) bons résultats sont affichés.

Une étude, citée récemment par le journal économique « Les Echos », (qui n’est pas vraiment un brûlot anti-capitaliste) est malheureusement passée inaperçue…

L’on y apprend que les dividendes versés aux actionnaires dans le monde ont dépassé les 1000 milliards de dollars pour atteindre 1030 milliards de dollars, soit + 43 % depuis  2009 !

Quant à la France, elle se situe en troisième place, juste derrière les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, avec 50 milliards de dollars de dividendes versés en 2013. Ainsi, après Wall Street et la City, Paris est la ville qui offre les plus belles opportunités aux actionnaires.

Les récents résultats du CAC 40 confirment ces chiffres puisque les profits de ces ténors sont passés de 59,8 milliards d’euros en 2012 à 73,6 milliards en 2013 (+23%), et devraient atteindre 87,3 milliards (+19%) fin 2014.

Alors que l’on demande des efforts, voire des sacrifices, aux salariés,
chômeurs et retraités, les actionnaires continuent d’effectuer des ponctions toujours plus importantes sur les entreprises.

Conséquence : ce qui est versé en dividendes ne peut être ni investi pour la recherche et le développement ni payé en salaires, ce qui est doublement délétère tant pour l’entreprise que pour ses salariés.

L’oligarchie économique étend encore et toujours sa puissance et sa prédation envers les entreprises, condamnées à une spirale infernale : rémunérer toujours davantage les actionnaires quitte à vider l’entreprise de son sang.

Pendant ce temps, le matraquage médiatico-politique bat son plein : les entreprises écrasées par les « charges » et le coût du travail, les riches « tondus » par le fisc et le manque d’« attractivité » du pays…

Cette propagande ne parvient plus à cacher une évidence tragique : les très grandes entreprises se développent à l’étranger, fuyant leur devoir fiscal tandis que les PME sont exsangues, l’austérité freinant la demande et les banques n’assurant plus leur rôle.

Par ailleurs, les inégalités s’accroissent de façon considérable puisque nos gouvernants d’inspiration libérale suivent à la lettre le trait d’humour d’Alphonse Allais : « Il faut prendre l’argent là où il se trouve : chez les pauvres. D’accord, ils n’en ont pas beaucoup, mais ils sont si nombreux ! »

Olivier CLARHAUT